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Le droit au silence de l’agent devant l’instance disciplinaire (MAJ)

'Le droit au silence de l’agent devant l’instance disciplinaire (MAJ)
Informations principales
Date de publication Date de publication : 04.07.2024
Catégorie(s) Catégorie(s) : Collectivités
Date de mise à jour Date de mise à jour : 04.07.2024

Comme annoncé dans une précédente information, par une décision 2023-1074 QPC du 8 décembre 2023, le Conseil constitutionnel a étendu pour la première fois le droit de se taire découlant de l’article 9 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen du 26 août 1789, à une personne mise en cause, non dans le cadre d’une procédure pénale, mais dans le cadre d’une procédure disciplinaire.

Il a jugé que le principe selon lequel nul n’est tenu de s’accuser, dont découle le droit de se taire, s’applique non seulement aux peines prononcées par les juridictions répressives mais aussi à toute sanction ayant le caractère d’une punition et implique que le professionnel faisant l’objet de poursuites disciplinaires ne puisse être entendu sur les manquements qui lui sont reprochés sans qu’il soit préalablement informé du droit qu’il a de se taire.

Jusqu’à présent, le Conseil d’Etat considérait que le droit de se taire n’était pas applicable aux procédures disciplinaires et avait seulement vocation à s’appliquer dans le cadre d’une procédure pénale (Conseil d’Etat, 23 juin 2023, n°473249).

Dans un arrêt du 2 avril 2024, la Cour administrative d’appel de Paris a pris acte de l’évolution de la jurisprudence du Conseil Constitutionnel et jugé que le fonctionnaire faisant l’objet de poursuites disciplinaires ne peut être entendu sur les manquements qui lui sont reprochés sans qu’il soit préalablement informé du droit qu’il a de se taire (arrêt n° 22PA03578 du 2 avril 2024).

La privation de cette garantie rend la procédure irrégulière et justifie l’annulation de la sanction.

Par une décision en date du 19 avril 2024, le Conseil d’Etat a transmis au Conseil constitutionnel une nouvelle question prioritaire de constitutionnalité (QPC) afin que ce dernier examine la conformité à la Constitution des dispositions législatives organisant les modalités de mise en œuvre de la procédure disciplinaire à l’endroit des magistrats, lesquelles ne prévoient pas que le mis en cause soit préalablement informé de son droit à garder le silence.

Le Conseil Constitutionnel a rendu sa décision le 26 juin 2024 (décision n°2024-1097 QPC du 26 juin 2024).

Dans un premier temps, le juge constitutionnel a repris les termes de sa décision du 8 décembre 2023 en énonçant que le principe selon lequel nul n’est tenu de s’accuser, dont découle le droit de se taire « s’appliquent non seulement aux peines prononcées par les juridictions répressives mais aussi à toute sanction ayant le caractère d’une punition. Elles impliquent que le professionnel faisant l’objet de poursuites disciplinaires ne puisse être entendu sur les manquements qui lui sont reprochés sans qu’il soit préalablement informé du droit qu’il a de se taire ».

Dans un second temps, il en a tiré les conséquences relativement à la procédure disciplinaire applicable à l’endroit des magistrats du siège.

Il déclare que :

  • Le magistrat mis en cause peut être amené à reconnaitre les manquements pour lesquels il est disciplinairement poursuivi. En outre, le fait même que ce magistrat soit entendu ou invité à présenter ses observations peut être de nature à lui laisser croire qu’il ne dispose pas du droit de se taire ;
  • Le magistrat doit être informé de son droit de se taire lors de son audition par le rapporteur au cours de l’enquête le cas échéant mise en œuvre une fois la procédure disciplinaire engagée ;
  • Le magistrat doit être informé de son droit de se taire lors de son audition devant le Conseil de discipline.

Il en conclut que les dispositions législatives contestées, en ce qu’elles ne prévoient pas l’information du magistrat de son droit de garder le silence, sont contraires à la Constitution.

Le raisonnement du juge constitutionnel est transposable à la procédure disciplinaire à l’endroit des agents publics et implique une information large de l’agent mis en cause de son droit de garder le silence.

L’employeur public doit en faire mention :

  • Dans le courrier d’engagement de la procédure disciplinaire ;
  • Dans le courrier de convocation de l’agent à la consultation de son dossier individuel si cette convocation fait l’objet d’un courrier distinct de celui engageant la procédure ;
  • Dans le courrier de convocation à l’entretien préalable (le cas échéant) ;
  • Dans le courrier de convocation de l’agent au conseil de discipline. 

Pour les procédures disciplinaires en cours, si le droit de l’agent de garder le silence n’a pas été notifié dans le courrier de convocation devant le conseil de discipline, il convient d’informer l’agent dès que possible de son droit de se taire, afin de se prémunir d’un risque contentieux.

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